Dieu pardonne
Cerné par l’ennemi, venu pendant la nuit,
Le village endormi, fut vite démoli
Nous n’étions que civils et nous vivions dociles
Dans les pleurs et les cris, je vis tous mes amis,
Vaches, cochons, brebis, exterminés, occis
Dans la petite ville aux saisons si tranquilles
Un tireur en kaki visa de son fusil
Tira, le coup partit, c’était au mois d’Avril,
Vint ce jour noir et vil, ces pauvres imbéciles
Ma vie, et de mon fils, sans que ne bouge un cil,
D’un jet net et précis, il en trancha le fil
Au motif aberrant que nous étions hostiles
Voici que vient l’Automne et son léger frimas
Le froid, les bois, festonne apportant ses tracas
Le fier soldat chantonne un bel hymne à la joie
Et Dieu pardonne ainsi l’acte du scélérat
Et Noël passionne, on attend le nougat
Partout on le claironne et la ville festoie
Quand la guerre prit fin, on jugea le bandit
Aux morts, le tribunal n’accorda pas crédit
Ainsi passa le temps. On effaça le crime
On oublia les torts et le corps du délit
Pour des besoins retors, on rangea le conflit
Et le "brave" soldat reçut médaille et prime
Rendu dans le civil, l’homme s’organisa
Trouva fille nubile et donc se fiança
Puis il se maria, ce n’est pas pour la frime
Et vint ainsi l’Automne et sa femme enfanta
L’ex-soldat est heureux d’enfin être papa
Pour toute la smala, l’homme travaille et trime
Puis, en son temps, Dieu donne un autre petit gars
Maman, pour ses bambins, prépare le repas
Qui s’intéresse encore aux drames de l’Histoire ?
Quand un grand bruit résonne en un furieux fracas
Personne ne vit plus ! Dieu pardonne. Moi, pas !
Repose en paix, mon fils, vengée est ta mémoire !
© Hami