A l'ombre des mots & Les Collections Éphélides
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 Une si simple histoire VIII

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reveuse
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MessageSujet: Une si simple histoire VIII   Une si simple histoire VIII EmptyJeu 27 Oct 2011 - 11:49

Chapitre 8


Dès lors le temps ne parut plus avoir court dans la vie de Cathy. Les secondes, les minutes, les heures ne semblaient plus avoir le moindre sens. Adam partait le matin et la retrouvait le soir toujours dans son fauteuil en cuir encerclée de feuilles noircies de mots qu'il n'avait pas le courage de lire.
Adam savait de toute façon ce qu'il y avait sur celles ci. Des mots de désespoir sortis tout droit d'un coeur désillusionné.
Une fois, en désespoir de cause il s'était dit qu'en lire un lui donnerait un indice sur la manière de la sortir de là. Mal lui en prit , il se souvenait encore de ses mots :

Je suis cette ombre
Obscur reflet de ce vide
Ma vie n'est pas vraiment belle
Quand elle n'est pas auprès de toi

Mon visage est sombre
On m'arrache à toi, impavide
Mes rêves ont le goût de sel
Depuis qu'ils ne sont plus pour toi

Je suis un nuage
Qui ne parcourt pas la terre
Qui s'en va faire naufrage
Auprès des âmes centenaires

Je suis l'étoile qui file
Te cherchant toujours et en vain
Quand mon désespoir recouvre fil à fil
Devant mes yeux clos, je te tends mes mains

Cathy mangeait à peine, respirait à souffle court. Aucune discussion ne pouvait la faire émerger de sa léthargie. Seule sa main se mouvait , esquissant ses attaques sur le pauvre papier blanc.
Quelques jours passèrent, Adam ne savait plus quoi tenter.
« Demain il faudra que tu fasses venir un psychologue ou quoi, tu n'es pas à la hauteur pour sauver une fille aussi désespérée que cette petite »
Il partit ainsi au travail, l'âme en peine débordante de déception.

La fin de journée arrivait en douceur, le soleil touchait, caressait, effleurait les joues de Cathy .Lui même semblait vouloir la consoler sans y parvenir.. Il n'y a pas vraiment de raison à la déraison, il n'y en a pas plus au retour à la réalité.
Aussi soudainement qu'inexplicablement Cathy leva la tête «  Tiens , Adam n'est pas encore rentré » Et finalement c'est ce changement si peu bouleversant, ce retard de quelques minutes qui pour nous serait passé inaperçu qui la ramena du bon côté de la vie.
Cathy fit le tour de la maison, des placards vides..  «  J'ai donc été absente si longtemps? » Peu à peu elle revenait dans le présent mais sans culpabilité ni peine. Elle savait bien qu'elle avait été un boulet à trainer pour Adam, qu'elle n'avait pas assumé son rôle auprès de lui mais curieusement tous les sentiments de honte, de détresse lui échappaient cette fois.
Lorsqu' Adam rentra , abattu d'avoir dû passer chez un psychologue qui lui avait promis de venir le lendemain , sa joie de la voir virevolter dans la cuisine à chantonner en préparant il ne savait quoi ne pouvait porter de nom.

L'impression soudaine de passer du manque de vie à une renaissance, le poids qui s'efface de votre corps alors même que peu à peu vous ne l'aviez senti s'installer aussi lourdement, ce battement qui vous vrille les oreilles d'une mélodie enivrante de bonheur....Adam ressentit mille autres choses encore qu'il résuma Joie par manque d'envie de rechercher plutôt que de savourer.
Quand il croisa à nouveau les deux papillons verts, il failli se jeter contre eux. Il s'enveloppa dedans , elle amarra aux siens pour qu'ils se fixent jusque dans son coeur.

Cathy elle ne disait rien, elle mourrait d'envie de se jeter contre lui, contre son regard qui reprenait naissance, de le serrer dans ses bras pour que l'inquiétude qu'elle avait dû lui causer disparaisse.
Dès que deux êtres se comprennent, ils se passent de mots, ils se passent d'excuses et de ressentiments.
C'est ce qu'il se passait pour Adam et Cathy, ils étaient là l'un pour l'autre,acceptant la manière de vivre et d'affronter cette vie même si elle était blessante pour les deux.

Emporté par l'émotion , Adam trouva en lui une infime, une minuscule étincelle d'envie. Il s'accrocha plus fort encore aux yeux transparents qui lui insufflaient l'espoir, il prit en douceur ce bout de bonheur et s'appliqua pendant quelques minutes à en faire une chose immense, une joie qui remplie le moment présent et vous donne cette impétueux besoin de crier au monde entier que la vie est belle.
Cathy le vit se transformer petit à petit et sentit qu'aucune parole ne devait gâcher l'instant.
Soudain , Adam s'enfuit de son champ de vision , couru jusqu'à sa chambre en lui criant : «  Reste ici , fais ce que tu veux , laisses moi quelques minutes mais attends moi ! »
Elle se prit au jeu bien entendu et commença les corvées auxquelles elle s'était soustraite pendant des jours, tentant de réfréner sa curiosité «  Ce qui est bien le second miracle de cette journée ! » se dit elle , joyeuse d'être de retour à la vie.

La frénésie silencieuse emplit l'appartement. Adam de son côté noircissait une feuille, de tout son amour possible, il réalisait un lieu magique, un havre de bonheur... difficile de préciser ce qu'il représentait pour lui mais ce paysage inscrit dans son âme il avait besoin de le réaliser et sentait la fierté d'avance de partager cela avec Cathy.
De son côté elle en avait des choses à nettoyer, ranger et noter la liste de tout ce qu'il manquait. Alors qu'elle s'affairait à jeter les journaux entassés sur la table basse du salon, relevant la tête pour les envoyer jusque dans le sac poubelle échoué un peu plus loin elle lâcha un « bordel » simultané avec le bruit que firent les journaux en retomba avec fracas bien loin du sachet.
Là, dans son fauteuil favori, là même où elle avait évacuer toute sa peine se trouvait une femme.
«  Une belle femme reprit 'elle  »
«  ça va , s'exclama t' elle , j'aurai pu voir une espèce de zombi ou de vieille toute horrible comme dans les films ! »
Brune , les cheveux longs et les yeux ambrés l'apparition la fixait en souriant avec bienveillance. Sa bouche s'ouvrit et laissa échapper un « Bonjour Cathy ». La voix était douce, légèrement voilée et semblait prendre une intonation lointaine comme celle qu'une mère prend avec l'enfant auquel elle doit expliquer quelque chose de grave, quelque chose d'adulte.
« A ben oui ! Répliqua Cathy à haute voix, tant qu'à devenir folle autant faire les choses bien et que mon hallucination parle bien sur! »
«  Je ne suis pas le fruit de ton imagination Cathy , je m'appelle Lucie, tu sais très bien qui je suis ». Même si son regard et sa voix étaient toujours aussi attentionnés Cathy sentit un long frisson lui courir sur le corps.
« Lucie,...Vous voulez dire ? La Lucie ?! »
A l'instant même où l'apparition allait répondre , Adam arriva dans le couloir en soufflant « Cathy bon sang ça fait quinze fois que je t'appelle ! Tu es devenue sourde? » «  Non juste folle » répliqua la dernière avec un sourire teint d'inquiétude.
Elle se tourna vers son fauteuil, guettant la réaction qu'elle ne pouvait imaginer d'Adam. Sauf que, comme dans un mauvais film, le fauteuil était vide.
Adam ne sembla ne pas l'avoir entendue et tout à son agitation il la prit par la main , traversa au pas de course l'appartement dans l'autre sens.
Cathy écoutait de loin les mots qui pour lui semblaient d'une importance capitale mais qu'elle ne pouvait tout à sa crainte intégrer dans son présent.
Adam lui montra, non sans fierté sa création , et malgré l'angoisse de ce qu'il venait de se passer Cathy ne put que s'émerveiller devant son oeuvre.
Le tableau qu'il avait dessiné, reflétait l'exact lieu de rêve et d'amour face auquel n'importe quel être humain se retrouvait muet, spectateur et admiratif. Cathy se perdait dans sa contemplation , son corps entier se baladait dans le monde qu'Adam avait crée.
Ce dernier voyait l'effet escompté dans les yeux de la demoiselle et ne pouvait avoir plus beau commentaire.
Pendant que son âme à elle, se détendait, éprise des formes et des couleurs, qui apaisaient l'inquiétude et la tension de toutes les mauvaises surprises et les souffrances accumulées en quelques jours ; celle d'Adam se concentrait sur les changements qu'il pouvait apercevoir , les épaules se soulèvent à un rythme doux, les yeux qui s'éclaircissent, les lèvres qui esquissent un sourire, le visage qui reprend vie et expression. « Et Dieu combien le sien est expressif, on lisait comme dans un livre ouvert, elle ne cherche pas à cacher ou retenir la vérité de ce qu'elle ressent » Adam la laissait à sa contemplation mais son esprit ne pouvait pas renier qu'il la contemplait elle, que son âme entière se voulait protecteur et aimant envers cet oiseau, fragile, naïf et brisé déjà si tôt par le premier envol dans sa vie.

Pendant ce temps, Cathy n'était peut être pas si fragile qu'Adam voulait bien s'en persuader. D'une part elle sentait l'attention qu'il portait sur elle à ce moment, le détail qu'il se faisait d'elle. « Et comme tous il se dit que je suis délicate et à préserver..Oubliant que la force d'un esprit est bien plus fort que celle d'un corps » Mais elle souriait, indulgente et à demi dans le monde féérique qui continuait à exercer son envoûtement. « Il faudrait que les hommes se mettent enfin en tête que c'est cette apparente faiblesse qui nous rend plus forte encore qu'eux... »
Cathy ne pouvait pourtant pas tout tourner à la dérision aussi facilement. « Je deviens folle alors? C'est cela le début ? Par amour ou par coup sur la tête , mon esprit s'en est allé assez loin pour que je sombre dans la folie? » Elle qui misait sa vie sur son esprit plus que tout autre chose elle sentait son corps vibrer de terreur de ce qu'il lui arrivait...
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