Les amours naufragées
Ô combien d'amoureux pour de belles sirènes
Ont affronté, des flots, les limites lointaines
Dans cette illusion se sont ainsi perdus
Combien ont regretté cette auguste fortune,
Des places de Paris, des plages de Béthune
Et, encore aujourd'hui, n'ont pas réapparu ?
Combien de ces vaillants, partis pour ce voyage,
Des rêves plein le coeur, ont cédé au mirage
D'un avenir meilleur en oubliant les maux ?
Qui connaît le chemin, affreuse destinée,
D'un amour, le chagrin, telle immonde saignée
L'un saisit le fautif, l'autre abonne aux sanglots
Triste et funeste sort pour ces âmes perdues
Aux confins du désert pour des joies perçues
Exhortant leurs esprits vers ces buts entrevus
Pauvres hères chétifs qui poursuivent le rêve
De rencontrer l’amour quand leur vie s’achève
À l’aube de ce jour sur des malentendus
Qui craignaient de la mort le courroux indocile
Ont connu du remord le parcours difficile
Mais même leurs regrets sont partis à l’oubli
Restent des souvenirs, un bien sombre grimoire,
Enfouis dans ces esprits qui refusent de croire
Que l’amour est bien mort car l’espoir s’est enfui
La belle et la bête, un vrai conte de fée
Une histoire d’amour par beaucoup oubliée
Elle, pauvre, sans sou, d’un âge à marier
Lui, vilain comme un pou, petit sang de noblesse
Avaient fait des projets et choisi leur adresse
Et voilà que le sort vient les contrarier
Cœur de loup solitaire et de sa bien-aimée
On en parle parfois, comme d’une épopée,
Père et mère opposés pour des motifs divers,
Elle, reine de cour, avait très belle allure
Lui, garçon du faubourg, n’avait pas de roture,
Forçaient les amoureux à changer d’univers
Clandestin, leur départ provoqua la cohue
Dans les ports, sur les quais on guetta leur venue
On raconta l’histoire où l’amour est vainqueur
Où les jeunes sont las, d’un bon accord, attendre
Le prestige de classe a plus dur à s’entendre
Le couple fut trahi par un sort de malheur
Le bateau l’emportant, une corvette fière
S’abimait corps et biens, lors de cette croisière,
Dans une étroite crique où la poussa le vent
Le destin s’acharna pour n’épargner personne
L’orage tombait dru sur la mer qui moutonne
Et dans ce bruit d’enfer, nul appel ne s’entend
Qui sont-ils ces amants, ces amoureux notoires,
Par les flots engloutis, malheureuses histoires
Que racontent les vieux, le soir, au coin du feu
Jeunes gens éperdus qu’emmènent les sirènes
Sur des bateaux perdus en des mers incertaines
Les retenant au fond. Qui s’en souvient ? Si peu…….
© Hami
À la façon de Oceano nox de Victor Hugo