Souvenirs par temps de brume
Matin gris, matin blafard, matin brouillard
Comme à chaque aube on me jette du bar
C’est qu’à cette heure j’ai le cœur morose
J’oublie même mon foie qui se prend une cirrhose
J’ai le cerveau qui se noie dans des résidus de fiel
L’estomac qui se débat avec un reste d’arc-en-ciel
J’ai le cœur aux talons et les talons sur le trottoir
J’ai les yeux embués, mais c’est pas à cause du brouillard
Il est là, debout, impassible comme un rappel
Aussi nu que le Christ en croix sur un autel
À balancer ses maigres branches au vent du matin gris
Est-ce l’alcool qui tremble ou le temps qui a refroidi
On n’y voit pas à deux mètres, dans ce blanc décor
Sacré temps de brume, j’ai des frissons dans le corps
Déjà que l’amertume me fait voir la vie en noir
Voilà que je m’enrhume, vacherie de brouillard
Un arbre dans la brume, un matin gris d’Automne,
Ces mots, comme une enclume résonnent monotones
"Sauve-moi, mon amour, cette vie m’insupporte"
Ton corps, comme un agrume, pendu à une branche morte
Je n’ai pas compris, ce jour-là, ton grand cri de détresse
Et depuis, cette image, partout où que je sois m’agresse
Nuits blanches à ne plus finir, de peur de m’endormir
De peur d’en rêver, peur de me souvenir
Un arbre dans la brume, ancré dans ma mémoire,
Les nuits d’infortune que je passe dans les bars
Ne m’aideront plus, il est maintenant bien trop tard
Pour qu’en ce dieu de clémence je puisse encore y croire