Et Satan embrassa les épaules du roi
Puis disparu soudain dans la terre; et l'effroi
S'empara de la cour, qui resta ébahie.
Alors, deux serpents noirs, des épaules trahies
Par ces baisers nocifs poussèrent : deux vampires!
Personne auparavant n'avait rien vu de pire.
Les deux bêtes mordaient, s'acharnaient sur le roi;
La tête couronnée criait de désarroi.
Quelqu'un trancha enfin les monstrueux reptiles,
Qui comme des rameaux, repoussèrent, facile.
Les sages médecins alors se réunirent :
Chacun se proposait de les anéantir.
Mais les traitements doux et ni les plus drastiques,
Aucun ne fit effet contre les maléfiques
Créatures d'enfer ; et régnait la terreur.
Alors Satan revint en tant que guérisseur
Auprès du roi Zahhak et il lui dit ainsi:
" Indestructibles sont ces bêtes sans merci.
Pour en avoir la paix, il te faut les nourrir;
Par la cervelle humaine il faut les assouvir :
Gavez-les! les serpents finiront par mourir."
Quel était le dessein du Malin par ces dires?
.......
Après cela, l'Iran tomba dans l'anarchie.
De l'empereur Djamshid on s'était affranchi.
Chacun faisait royaume à part et combattait
Le royaume voisin. Une ombre amère hantait
Ce qui fut autrefois un empire brillant.
En Arabie, dit-on, règne un roi bienveillant...
.......
Zahhak avait mille ans. Il régnait sur le monde;
Le temps semblait propice à cet esprit immonde.
La sagesse cédait la place à la folie,
Le bonheur et la joie à la mélancolie.
Et la sorcellerie remplaçait la science;
L'obscurantisme noir s'emparait des consciences.
La vertu, la droiture englouties par l'abysse
Laissaient le champ libre aux incursions du vice.
Les démons exultaient: ils avaient le bras long.
Les criminels régnaient, ainsi que les félons.
Les justes se cloitraient dans le plus grand silence
Et l'on ne disait mot sans avoir confiance.